Aux yeux de l’hypersensible, les émotions, comme tout le reste, paraissent bien souvent « trop ». Trop fortes, trop intenses, trop débordantes, trop envahissantes…et celui qui les ressent est souvent qualifié à son tour de « trop sensible, trop fragile, trop vulnérable ». Plus d’un voudrait s’en débarrasser, pour se sentir plus serein, retrouver une « normalité », reprendre le contrôle de soi… Certains vont même jusqu’à les haïr ou à les considérer comme des ennemis tellement elles les envahissent ou les font « souffrir ». Pas simple quand on sait que nous passons notre vie a en ressentir et qu’il suffit d’un moindre stimuli, d’une image, d’un mot, d’un regard, d’un geste pour que l’émotion nous frappe en plein cœur et prennent possession de nos capacités, nous submergent. Et pourtant…

LES EMOTIONS, CES FONDAMENTALES À NOTRE EQUILIBRE ET NOTRE BIEN ETRE

Saviez-vous que toutes les civilisations du monde ainsi que les animaux ressentent et expriment les émotions dites primaires comme la peur, la colère, la tristesse ou encore la joie ? Les émotions, malgré ce qu’on voudrait leur faire croire, ont bel et bien une utilité majeure. Ce sont des mécanismes adaptatifs universels qui ont permis et permettent encore aux différentes espèces de s’adapter à leur environnement afin d’y survivre.

Il suffit d’imaginer quelques instants un monde sans émotion pour en comprendre l’utilité. Sans peur par exemple, notre espèce humaine serait incapable de se prémunir des dangers environnants et elle se serait depuis bien longtemps fait engloutir par d’autres règnes. Voyez-vous, la peur permet d’identifier tout ce qui peut nuire à notre sécurité afin de développer les stratagèmes et les ressources pour se sécuriser et continuer de se déployer. La tristesse quant à elle nous alerte sur notre état d’être. Elle a vocation à recréer du lien social et est le témoin de ce qui nous manque ou nous fait défaut. La colère assure l’intégrité des peuples, de leurs valeurs et de leurs territoires. Elle parle de justice et de respect. Heureusement que nous sommes capables de nous mettre en colère lorsqu’on touche à notre corps sans notre consentement ou qu’on nous assaille de mots ou de gestes offusquant !

DU CERVEAU AU CORPS

Véritable interface entre le cerveau et le corps, l’émotion nait d’une réaction neuronale provoquée par un stimuli et engendre des réactions musculaires, hormonales, neurologiques et immunitaires bien précises dans le corps.

A chaque émotion correspond une combinaison précise de sensations. La peur contracte, tend et refroidit. Elle prédispose à la paralysie ou à la fuite. La colère échauffe et prépare au combat. La tristesse recroqueville, isole, noue, provoque des larmes. La joie ouvre la cage thoracique, la respiration est déployée, le teint coloré, un sourire se dessine sur le visage. Toutes les émotions engendrent des réactions corporelles précises et stimulent des ressources cognitives afin d’enclencher une réaction globale et adaptée à la situation. En somme l’émotion est un véritable outil de régulation interne. Veillant à notre équilibre au quotidien, elles existent et s’enclenchent tel un réflexe sans que nous en ayons le contrôle et la conscience.

 

DERRIERE L’EMOTION SE CACHE TOUJOURS UN BESOIN.

Derrière chaque émotion se cache un besoin. Un besoin de se mettre en sécurité, de communiquer, de partager, de justice, de tranquillité, de se respecter ou de se faire respecter…  Nos émotions sont en fait des alliées, des indicateurs, des témoins qui nous indiquent la marche à suivre pour satisfaire à nos besoins qu’ils soient primaires ou secondaires. Elles agissent à l’instar de véritables baromètres intérieurs.

Lorsque nous les refoulons, le risque de se déséquilibrer est grand. C’est ce qui arrive lorsque des conflits internes ne sont pas résolus ou que l’individu n’arrive pas à aller complètement vers lui-même, ses valeurs, ses aspirations profondes ou que ses besoins fondamentaux ne sont pas satisfaits.

Une bonne intégration des émotions renforce la connaissance et le développement de soi et de son environnement. Elle permet de faire alliance avec soi-même, de mettre en place les actions nécessaires pour résoudre les zones d’inconfort, de manque ou d’insécurité et de (re)trouver son équilibre profond. Les émotions dites positive nous confirment  un état d’harmonie. Négatives, le besoin de le retrouver. Ce n’est alors pas l’émotion « négative » qui pose problème mais la manière que nous avons de les comprendre, de les décrypter et d’en faire quelque chose de positif.

LE CYCLE DE L’EMOTION

L’émotion, dont les racines étymologiques latines motio font référence au mouvement, est un cycle de vie à lui seul. De ce cycle nait en premier la charge émotionnelle, elle même engendrée par un stimulus intérieur ou extérieur. L’émotion monte, le corps et l’esprit sont alors fortement mobilisés. De ce premier mouvement née la tension, la contraction qui peut se manifester de diverses manières et ce selon le type d’émotion ressentie : une boule dans la gorge, un afflux de sang dans le crâne… Cette tension ou charge perdure jusqu’à la décharge émotionnelle, troisième mouvement qui permet le retour à la normale.

La nature même de l’émotion demande alors une mise en mouvement de son état intérieur. Bloquer, taire, enterrer, contenir, renier ou refouler une émotion restreint la bonne intégration de ce mouvement de vie. Bien sûr, chacun doit trouver les ressources et les moyens adaptés à sa personnalité pour accompagner le plus sereinement possible ce mouvement naturel : respiration, mouvement corporel, parole, écriture, pleurs, verbalisation, chant, dessin,  toute autre forme d’expression et de mise en mouvement intuitive, il y a autant de possibles que d’individus. Cette capacité de faire avec nos émotions se développe dès l’enfance. Plus les parents et éducateurs sont en mesure d’aider l’enfant à développer ses ressources émotionnelles, plus lui sera aisé de réguler ses tensions internes.

Notons que c’est dans le dernier et troisième temps, celui de la décharge émotionnelle, que le voile se lève et que nous retrouvons la sérénité d’esprit et de cœur. C’est à ce même endroit que nous sommes en capacité de comprendre, si raison il y a, nos émotions (rappelons nous que nous sommes gouvernés par 95% de pensées inconscientes !). C’est à cet endroit clairvoyant et respirant que nous revenons à notre pleine puissance, et que nous pouvons mettre en place les actions adaptées pour résoudre la problématique d’origine, ou tout simplement nous enrichir et nous glorifier de l’expérience passée. C’est parfois même à cet endroit libérateur que nous renaissons à nous-mêmes et retrouvons une profonde sérénité.

INTEGRER POSITIVEMENT SES EMOTIONS 

Puisque chaque émotion est un réflexe utile et adaptatif, l’idée n’est alors pas de la contrôler ou de la nier, mais plutôt de la reconnaitre et de l’intégrer.

Puisqu’elle agit à l’instar d’un messager, l’idée est avant tout d’écouter ce message, de noter son état intérieur, en nommant ce qui nous traverse sans jugement aucun. Juste accueillir et reconnaitre notre état plutôt que de le refouler ou le distancier. Si l’émotion est là, c’est qu’elle a une raison d’être. Et rappelons nous, elle veille sur nous, négative ou positive, remercions la ! En l’observant et en lui donnant la place qu’elle mérite, la tension émotionnelle diminue déjà de quart voir de moitié. Parfois même cela suffit à enrayer la problématique sous-jacente et à mettre en place les réactions et les ressources engageant le retour à l’équilibre.

Une fois reconnue et nommée, l’émotion peut exiger, notamment lorsqu’elle est intense ou qu’elle perdure depuis longtemps, à être accompagnée, à être éprouvée, à être traversée, exprimée (dans le sens de faire sortir, extraire de soi…). L’expression à travers la parole, l’écriture, la mise en mouvement, sera une clef intéressante pour accompagner ce mouvement. Il faut parfois aller dedans, faire corps, danser avec l’émotion pour en comprendre la nature, les raisons, en tirer les conclusions, résoudre la problématique sous-jacente,  ou tout simplement vider la charge émotionnelle retenue jusqu’à alors pour revenir à un état serein, paisible…

CE TRESOR DE BOUSSOLE INTERIEURE

Lorsqu’il trouve les outils et ressources pour faire avec et les intégrer pleinement positivement, l’hypersensible perçoit enfin sa chance. Les tensions générées par les émotions dites négatives sont plus courtes, moins intenses, mieux intégrées, faisant place belle aux émotions et sensations positives, qui rappelons le au passage soit décuplées chez l’hypersensible !  S’extasier pleinement devant un coucher de soleil,  rire aux éclats, être saisi d’amour, de gratitude, serrer ses proches dans ses bras, échanger un sourire ou un regard avec un inconnu, ouvrir son cœur et se réjouir de petits et de grands bonheurs qui nourrissent l’âme…quelle richesse de l’être !

Intégrer positivement ses émotions, aller vers elles, faire avec elles en toute connaissance de cause, c’est aller vers sa vulnérabilité et non la repousser. C’est en observant ce mouvement en soi qu’on se met alors dans sa « vulnérabilité puissante ». Et c’est à cet endroit que l’émotion peut être positivement transformée, nous apprendre, nous enseigner, nous faire grandir sans nous déborder. C’est également à cet endroit que nous la vivons tout en comprenant que nous ne sommes pas l’émotion qui nous traverse, mais que nous vivons des émotions pour le meilleur de nous même et de notre chemin…

Les émotions deviennent alors une voie royale pour aller vers soi-même, ses valeurs, ses besoins ô combien précieux. Elles promettent un équilibrage profond, un déploiement authentique de soi, une envolée des possibles. L’hypersensible comprend alors qu’il est un fait un être doté d’une grande boussole intérieure, qui lui permet, lorsqu’il a appris à s’en servir,  de toujours trouver son chemin et sa stabilité dans cette grande aventure qu’est la vie. Il se glorifiera de ses ressources émotionnelles et reconnaitra alors la magnificence de ce son « hyper ».

Espérant que ces quelques lignes pourront éclairer votre cœur,

Nina BOSSARD NATUROPATHE – PRATICIENNE METHODE 3D – FORMATRICE & AUTEURE

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